10 avril 2018

La Petite Fadette, de George Sand


Qui c'est qui relit un livre pour la centième fois, se persuade qu'elle ne l'a jamais commenté, rédige une chronique, et se rend compte au moment de la publier qu'elle avait déjà écrit un article sur ce roman ?  C'est bibi, bien sûr ! Qu'à cela ne tienne, maintenant que la chronique est écrite, je la publie, et je me rends compte que mon avis n'a pas du tout changé depuis trois ans...


Résumé :

Lorsque les jumeaux Landry et Sylvinet sont nés, au cœur de la campagne française du XVIIIème siècle, la sage-femme a conseillé à leurs parents de les séparer le plus vite possible. Le conseil n'a pas été suivi, et lorsqu'adolescent Landry est envoyé travailler dans une autre ferme, Sylvinet se morfond et disparaît. Landry, à la recherche de son frère, obtient l'aide de la petite Fadette, la petite-fille d'une vieille dame acariâtre qui se dit sorcière. Et Landry apprendra que la jeune fille rejetée par tout le village cache en fait un coeur d'or.


Mon avis :

Vous connaissez le concept du livre-doudou ? Celui que l'on connaît par cœur mais vers lequel on revient régulièrement, pour un peu de familiarité, celui qui nous réconforte comme un ami proche ?

La Petite Fadette, c'est l'un de mes livres-doudous. Je l'ai lu dans mon enfance, relu plusieurs fois dans mon adolescence, et puis récupéré sous format ebook pour pouvoir le relire encore et encore, dans le désordre, par passages, en diagonales ou de haut en bas. Je pense que vous l'aurez deviné : n'espérez pas un avis objectif de ma part. Ce roman c'est pour moi un bonbon sucré et réconfortant.

Il est parfois difficile de savoir ce qui plaît dans un livre-doudou, et je suis souvent étonnée que ce roman fonctionne aussi bien pour moi. D'abord, d'habitude les histoires d'amour m'ennuient. Ensuite, ce roman a ses petits défauts que je reconnais de bon cœur. Par exemple, je suis toujours un peu étonnée de la différence entre la façon dont la petite Fadette est considérée et ce que l'on découvre de sa personnalité au travers des yeux de Landry. On parle beaucoup de sa "mauvaise réputation" sans jamais expliciter de quoi il s'agit ou ce dont on l'accuse à part d'avoir une mère qui a abandonné sa famille. On dit qu'elle a mauvais caractère, qu'elle se moque des gens, les insulte, ce genre de choses, mais avec Landry elle est parfaitement polie et calme ; j'ai un peu de mal à croire que sa personnalité ait changé du jour au lendemain, ou qu'un village dans son ensemble lui en ai attribué une qu'elle ne méritait absolument pas. Bref, je sais que la "rumeur publique" peut être très cruelle, mais là il me semble que ca manque un peu de crédibilité.

Ceci dit, je pourrais tout pardonner à ce roman rien que pour ses dialogues, ou plutôt, les discours de son héroïne. Quand la petite Fadette parle à Landry le soir de la Saint-Andoche, le pauvre gamin est ensorcelé, mais honnêtement, moi aussi. Quand elle parle à Madelon, son humilité me serre le cœur, et quand elle avoue enfin son amour à Landry, je ne peux plus retenir mes larmes. Enfin, quand elle guérit Sylvinet rien qu'en lui parlant, elle a l'air de faire de la magie, mais ses mots sont si beaux que j'y crois sans hésiter. Il n'y a pas d'envolées lyriques, pas de grandes phrases ou de beaux poèmes, juste une langue simple, qui explique sans embellir, des mots terre-à-terre qui respirent l'honnêteté et la sincérité. J'ai beau relire encore et encore ces passages jusqu'à presque les connaître par cœur, ils continuent à me toucher tout autant à chaque fois.

Tout ceci est emballé dans une jolie histoire assez simple, au cœur de l'écrin campagnard qui a fait la renommée de George Sand. Les détails géographiques et quelques minuscules apartés ajoutent un charme inattendu ; par exemple, quand le lieu d'une rencontre est présenté de façon précise comme si le lecteur connaissait forcément l'endroit ("...dans le chemin de sable qui descend des vignes d’Urmont à la Fremelaine"), ou quand on nous apprend une anecdote où l'on sent encore la colère des gens de la campagne ("...dans le petit chemin creux qu’on appelle la Traîne-au-Gendarme, parce qu’un gendarme du roi y a été tué par les gens de la Cosse, dans les anciens temps, lorsqu’on voulait forcer le pauvre monde à payer la taille et à faire la corvée, contrairement aux termes de la loi, qui était déjà bien assez dure, telle qu’on l’avait donnée"). La narration est destinée à une génération de lecteurs qui doivent être familiers avec ce genre de décor, et pour nous qui ne le sommes pas, elle est a un parfum inimitable de nostalgie, car George Sand adorait visiblement la vie des gens simples qu'elle met en scène. Leurs conditions de vie sont probablement idéalisées, mais ce roman fait un peu office de conte de fée réaliste, et c'est ce que j'aime.

En résumé, ce roman est en fait un joli conte pour adultes, plein de douceur et de nostalgie, et surtout embelli par des dialogues inimitables. Le temps, au lieu de l'abîmer, donne à ce récit une nouvelle saveur. J'aime beaucoup les romans champêtres de George Sand, mais celui-ci reste mon préféré.


Pour en savoir plus :

1 commentaire:

  1. Bonjour,
    Jolie chronique. "La petite Fadette" est aussi mon roman favori de George Sand avec ses personnages particulièrement attachants.
    J'en ai causé ici : http://sfemoi.canalblog.com/archives/2017/07/03/35443840.html
    A +

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