31 août 2016

Les Inhibiteurs, tome 1 : L'espace de la révélation (Revelation Space) d'Alastair Reynolds


Cette année j'ai surtout lu de la science-fiction, en commençant par ce pavé que j'ai découvert en début d'année.  Une lecture au hasard, sous format audio et en version originale avec laquelle j'ai pris pas mal de risques, mais qui ne m'a pas déçue !


Résumé :

Mon premier est un archéologue du futur, issu d'une famille célèbre et puissante, obsédé par une civilisation disparue mystérieusement ; ma seconde est une femme soldat, séparée de son époux à cause d'une erreur d'aiguillage lors d'un voyage intergalactique, recrutée de force pour devenir assassin ; ma troisième est technicienne sur un énorme vaisseau spatial délabré dont l'équipage cherche désespérément à soigner son capitaine, atteint d'une peste qui tend à prendre le contrôle du vaisseau ; mon tout est un piège qui pourrait bien mettre fin à l'humanité entière...


Mon avis :

Encore un livre choisi presque au hasard des promotions Audible. Il se trouve que le narrateur est le John Lee dont la voix m'avait séduite quand il racontait la trilogie Le Siècle de Ken Follett. Il semble se spécialiser dans les pavés de plusieurs centaines de pages, ce qui m'arrange bien : mon abonnement Audible me permet d'acheter un livre par mois à un prix fixe, autant rentabiliser, et un pavé est beaucoup moins impressionnant et beaucoup plus digeste en format audio. J'avais noté ce titre, Revelation Space, probablement à cause de son résumé, et quand il a été proposé à 6 dollars, j'ai sauté sur l'occasion sans me poser de questions et sans en avoir (re)lu le moindre résumé ou le moindre avis.  J'aime prendre des risques !

Au début, je dois dire que John Lee m'a décue, pour une fois, et à cause d'un défaut de narration qui peut paraître minuscule mais qui a beaucoup d'impact sur la compréhension : il ne marque quasiment pas de pause entre les paragraphes où il y a un changement de narrateur. Avant qu'on ne se rende compte qu'il y a trois points de vue distincts et qu'on arrive à les distinguer grâce à quelques détails, c'est un petit souci qui a tellement d'impact pour la compréhension que j'ai dû recommencer à zéro après quelques heures d'écoute. Peut-être s'agit-il simplement d'un problème au montage, mais profiter d'un roman aussi complexe et découvrir un nouvel univers sous format audio demande déjà pas mal de concentration, alors c'est un peu rude quand on nous met des bâtons dans les roues.

Passé ce malentendu et une fois rentrée dans l'histoire, le reste a coulé comme du miel, et j'en suis la première étonnée car ce n'est clairement pas un roman de SF parmi les plus accessibles. On est en plein dans le space opera, futur lointain, décors grandioses et innovations technologiques à la pelle. C'est simple : les héros de notre histoire sont tellement capables de prouesses techniques qu'on a un peu de mal à les croire quand ils disent "ce n'est pas possible". J'ai vu un commentateur sur Goodreads se plaindre du schéma "une phrase d'action, cinq phrases d'explication". Ca ne m'a absolument pas dérangée car d'une part les explications ont tendance à être fascinantes (à défaut d'être toujours entièrement compréhensibles), et d'autre part l'action est omniprésente. Revelation Space est un récit d'aventures avant tout : de rebondissements en retournements de situations, de révélations en changements d'alliances, tout change très, très vite.

J'avoue quand même que cette débauche futuristique m'a un peu dépassée par moments. La limite entre être vivant, unité pensante et machine intelligente est on ne peut plus floue, ce qui est assez perturbant : plusieurs personnages importants sont difficiles à qualifier et donc à se représenter. Il y a aussi toute la panoplie d'implants que les humains portent ou retirent du cerveau les uns des autres, ainsi qu'un programme conscient (ou pas ?) capable d'utiliser le corps d'un humain comme un outil, et des êtres pensants (dont l'un qui semble presque un virus ?) qui se glissent aussi facilement dans les cerveaux humains que dans le fonctionnement des machines... C'est confus, mais aussi intéressant et ouvert à interprétation.  J'ai eu aussi beaucoup de mal avec la fin, qui devient carrément ésotérique, et après avoir fini le roman, je suis incapable de déterminer si la grande menace découverte au cours des pages s'est concrétisée ou pas, voire même si les personnages principaux sont encore en vie... C'est dire si je suis un peu perdue, sans en être pourtant particulièrement frustrée, bizarrement.  Je crois qu'en cours de lecture je me suis habituée au fait que tout ceci est trop grandiose, trop ésotérique, trop futuristique pour que mon petit cerveau puisse tout saisir en détails.

Toute cette action et toute cette technologie n'empêche pas de créer des personnages intéressants, loins des stéréotypes et d'une division manichéenne entre bons et mauvais, bien que pas particulièrement approfondis du point de vue émotionnel. C'est amusant car en commencant ce récit qui reprend beaucoup de codes de la science-fiction "classique", je m'étais imaginé qu'il avait été écrit vers les annés 60-70 ; puis j'ai révisé mon jugement en découvrant qu'il mettait en scène une majorité de personnages féminins, et pas dans des rôles très genrés (et de fait, ce premier tome a été publié en 2000). Nous avons ainsi une soldate devenue tueuse très efficace, une technicienne/scientifique/spécaliste des armes ultra-pointue et sans états d'âmes, et une jeune écrivain/journaliste moins aguerrie mais qui trouve tout à fait sa place auprès d'un époux pourtant hyper-arrogant.  Le tout passe comme une lettre à la poste, sans compromis et sans heurts. C'est vraiment agréable de voir des personnages féminins forts dans un genre aussi traditionnellement masculin.

C'est donc un fait que l'action est au premier plan ; l'arrière plan est bien plus flou. Revelation Space est un space-opera carrément intimiste au final, ce qui est assez surprenant.  Tout ce qu'on sait de la civilisation humaine à l'époque du récit est qu'elle a conquis l'espace (mais pas entièrement, et apparemment l'âge d'or de la conquête spatiale est déjà passé), qu'elle vit dans une série de mondes avec peu de contacts et peu stables politiquement (les guerres, les révolutions et les destructions à grande échelle ne semblent pas les émouvoirs), et qu'au final... on est loin de l'avenir embelli par le progrès, on nage plutôt dans le lugubre et le manque de repères moraux. Mais il est vrai qu'on en sait plus sur l'intérieur du vaisseau où se passe une grande partie de l'intrigue que sur les conquêtes territoriales de l'espèce humaine.

Voilà, pour les fans de science-fiction qui n'ont pas peur d'affronter les exemples les plus hard-core du genre, allez-y, vous ne serez pas décus. Je l'ai personnellement dévoré en version originale, qui est probablement assez ardue pour ceux qui ne maîtrisent pas bien l'anglais, mais il paraît que la traduction est réussie - même si personnellement je trouve que "light-hugger" a quand même plus de classe que "gobe-lumen" pour qualifier un vaisseau spatial. Je ne sais pas si je lirai la suite, qui a l'air assez différente de ce premier tome, on verra si je tombe dessus à l'occasion. Pas tout de suite en tous cas, il faut que je souffle un peu après cette promenade intersidérale...


Pour en savoir plus :

4 commentaires:

  1. Content de voir que tu as apprécié.
    Je pense que c'est un univers qui n'est effectivement pas facile à appréhender pour tous les lecteurs. Mais perso j'aime beaucoup l'abord "grands abimes froids de l'espace avec ces vaisseaux dont les équipages sont au bord de la folie et de l'inhumanité".
    Le 2e volume de cette série, La cité du gouffre, est effectivement assez différent puisque l'on traine moins dans ces grands vaisseaux spatiaux, mais tout aussi intéressant. Après, pour le 3e et 4e, on repart dans l'espaaaaaaaaace infini et c'est très chouette aussi. :-)

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  2. Merci pour ce commentaire ! Moi aussi j'ai aimé le côté sombre de tout ceci, en particulier ce qu'il se passe dans le vieux vaisseau (j'ai oublié le nom maintenant). Ca fait presque un huis-clos à l'intérieur d'un plan hyper-large, c'est étrange. Je viens de me rendre compte qu'il y a maintenant 6 volumes publiés, et tous une vingtaine d'heures ou plus en audiolivre (sauf le dernier)... Repenser à cette lecture qui date déjà de quelques mois me donne envie de continuer.

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  3. Pas encore lu la suite mais j'ai beaucoup aimé celui-ci.

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  4. Faudra peut-être que je m'y intéresse (mais en VF et sur papier, sinon je risque de m'y perdre facilement xD)

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